04 – Maroc 2004 – Premier contact avec la piste (ouille)

Publié le 5 janvier 2004

Lundi 5 janvier
Quelque part vers Jaffar


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Préparation du matin

Le départ de l’auberge est difficile, on est bien, la chambre est agréable avec ses tentures berbères aux murs et son plafond en plâtre sculpté. L’eau chaude a eu un peu de mal à arriver jusqu’à la chambre, mais en insistant un peu auprès du patron, on a fini par en avoir. Sam et Marc partent à Midelt pour retirer un peu d’argent. On voulait décoller vers 10 h, nous partons joyeusement à midi. Et là, c’est le début de l’aventure. Le but est d’aller jusqu’au cirque de Jaffar, assez facile à atteindre selon le patron de l’auberge : « vous suivez le chemin, vous contournez le mamelon là-bas et vous arrivez au cirque ».

Nous voilà donc partis. Le chemin est assez caillouteux, puis commence à traverser des oueds à sec.


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Gauche ou droite ?

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Du caillou

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Pause chute

Marc nous fait un petit briefing sur la conduite à adopter sur la piste :
– ne freiner que de l’arrière ;
– se mettre debout ;
– mettre gaz car ça passe mieux sur un filet de gaz qu’à vitesse trop lente.


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Piste non damée

Donc j’ai fait comme il a dit, j’ai mis gaz. Un oued, ça passe, deux oueds, ça passe mais au troisième, ça passe pas ! La moto s’emballe, je n’arrive pas à la contrôler, et boum, par terre. Mon casque cogne violemment contre des cailloux. Je suis un peu sonnée mais je n’ai mal nul part. On relève la moto, j’attends quelques instants et on repart.
Un oued, ça passe, deux oueds, ça passe et au troisième, rebelote, ça ne passe pas et boum par terre ! Même chose que la première fois : je n’arrive pas à contrôler la moto, elle part d’un côté puis de l’autre et je tombe. Je recogne le casque par terre, mais je ne me fais toujours pas mal (heureusement !). Et là, je craque. Je respire violemment et d’un coup, ça part. Un énorme cri qui me vient du ventre. Puis un second. Que je ne contrôle pas, que je n’ai pas réfléchi. Ils sont juste là. C’est la première fois que ça m’arrive. J’ai souvent eu envie de hurler, mais j’ai toujours eu un blocage. Alors que là, pas de blocage, pas même une pensée. Juste deux cris. La peur qui sort. Puis ça passe, je pleure, je tremble, j’ai peur. Je finis par remonter sur la moto et on repart. C’est un peu plus tard que j’ai compris ce qui s’était passé. Des conseils de Marc, j’avais surtout retenu de mettre un poil de gaz pour passer mieux. Aussi, les oueds, je les passais en seconde avec un peu de gaz quand les autres passaient en première en débrayant !! Les oueds, ça doit pouvoir se passer en seconde avec gaz, mais je n’ai pas encore la technique et les 30 kilos de bagages n’aident pas. J’ai passé les oueds suivants en première, ça allait déjà tout de suite mieux.

Au détour d’un virage, nous passons à côté d’une maison, perdue, là, loin de toute route. Puis, deux kilomètres plus loin, nous croisons un homme au milieu des montagnes. Pas très sûrs de notre route, nous lui demandons si la piste mène bien à Jaffar. Il nous fait comprendre (pas facile quand on ne parle pas la même langue) que le chemin est écroulé et qu’on ne peut pas aller beaucoup plus loin. Puis, au passage, il nous demande de l’emmner jusqu’à Midelt. Nous lui répondons que ce n’est pas possible, il se désintéresse alors complètement de nous et part. Nous doutons de la fiabilité de son information et Marc part en reconnaissance pour voir quel est l’état de la piste. Enfin, piste est un grand mot. En fait, nous pensons être sur un chemin indiqué sur la carte Michelin comme « chemin muletier ». Au bout d’une demi-heure (et de quelques inquiétudes de la part d’Edith), Marc nous appelle sur les talkie-walkie. Le chemin est ok, il y a juste une montée un peu difficile mais après, on rejoint une piste, une vraie.


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Belle silhouette

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Oued grimpant

D’une montagne recouverte d’oliviers, nous passons petit à petit à un paysage aride et plat, au sol recouvert de cailloux avec des arbustes disséminés sur le plateau comme des légumes façon « nouvelle cuisine » sur une assiette.


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Arbres

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Tronc torturé

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Dénudé

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Belle grimpette

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C’est ma moto mais c’est pas moi

Dans l’absolu, la montée difficile repérée par Marc ne me semble pas infaisable, mais je me sens fatiguée, je ne maîtrise pas vraiment bien la moto, alors je laisse à Sam le soin d’amener ma moto en haut.

Le paysage change de nouveau et nous roulons au milieu de grosses touffes d’herbes de 50 cm de haut et largement espacées. Nous n’avons toujours pas trouvé le cirque de Jaffar et nous n’avons pas vraiment l’impression d’avoir contourné le « mamelon » indiqué le matin même par l’hôtelier. Un creux dans le sol me fait espérer un court instant.


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Repérage

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Oued

Mais ce n’est qu’un oued de plus, toujours asséché, bien profond et encaissé. Le soleil commence à être bas sur l’horizon et il faut penser à planter la tente sous peu, avant qu’il fasse nuit. Mais comme nous sommes en hauteur, il risque d’y avoir du vent et de faire très froid. Alors nous continuons en suivant l’oued. Nous arrivons à un village. Attroupement immédiat des gamins qui réclament stylos et bonbons, sans être trop insistants. Marc se renseigne, il n’y a pas de chef du village, nous partons dans la montagne pour camper.

Les trois derniers kilomètres sont difficiles, on voit de moins en moins bien. C’est l’heure à laquelle je trouve qu’il est le plus pénible de rouler, parce que tout est gris et flou. On finit par arriver au niveau de l’oued. Sur le côté, un petit bout de terrain sans trop de cailloux est parfait pour camper. Pendant que Marc et Sam déchargent les motos, Edith et moi montons les tentes. Sur la piste à côté de l’oued, un mec passe en vélo, alors qu’il fait nuit noire…

Pour le repas de ce soir, nous salivons tous sur le poulet acheté la veille. Plusieurs fois dans la journée, nous avons failli nous arrêter pour le manger et plusieurs fois, nous avons continué en nous disant qu’on le mangerait un peu plus loin (note : c’est un autre défaut de ces vacances, le fait de rouler sans avoir mangé ou de toujours reculer le moment de manger). Mais il y a un hic : dans le tas de bagages que Sam a déchargé de ma moto, pas de trace du sac noir dans lequel se trouvait le poulet et deux pains. A la lumière des lampes torches, on vérifie autour des motos, sur la piste, autour des tente. Rien. Disparu. Envolé. Nous avons faim, mais ce sera un dîner frugal. Les mecs essayent d’allumer un feu, mais il n’y a pas de bois aux alentours. Les branchages qu’ils trouvent brûlent très rapidement et produisent une épaisse fumée qui a la bonne idée de venir droit sur les tentes. Le feu est laissé à sa triste fin et c’est sans regret que nous le laissons s’éteindre. La nuit est fraîche et agitée (difficile d’arriver à trouver une position confortable et où on a chaud). Cela fait partie des moments où nous avons béni le drap en flanelle et la couverture en polaire. Au début de la nuit, quelques bruits suspects nous font sursauter. Mais ce ne sont que les toiles de tente qui bruissent et nous nous y habituons.
Dehors, c’est la pleine lune.


Maroc 2004, Moto, Un peu d'air pur