[CR] Quatre jours

Publié le 27 juin 2008

Partir quatre jours, c’est :
– me taper 300 km comme passagère sur un ER6 et trouver toujours ça pas si désagréable que ça;
– retrouver après quinze jours ma moto avec un plaisir immense et me dire que j’ai été folle de vouloir la vendre;
– changer le pneu arrière dans une petite ville paumée en Ardèche pour largement moins cher que dans les grandes métropoles; – roder le dit-pneu en 30 bornes, bandes de peur comprises sur une ‘tite route qui va bien;
– se rendre compte qu’on a choisi de venir rouler en Ardèche en plein pendant l’Ardéchoise;
– apprendre par la même occasion que l’Ardéchoise est une énorme concentration cycliste, avec près de 15 000 deux-roues non motorisées sur les routes du département;
– trouver comme gîte un ancien couvent et se retrouver à table devant un lapin au gingembre, entouré de cyclistes et de retraités en vadrouille;
– faire Lamastre-Aubenas en remontant une file de vélos, groupés par paquets de un à six, espacés de quelques mètres. Manquer par moments de pêter un câble de ne pas pouvoir rouler correctement. S’arrêter regarder les genêts en fleur, histoire de se calmer et de se dire que la vie est belle et qu’on a tout le temps de rouler;
– faire de l’élevage de tanche et me dire que l’élève apprend drôlement vite. Tellement d’ailleurs qu’il faudra bientôt qu’il passe à meilleur éleveur;
– visiter un gîte pour organiser une concentre pour les motards auvergnats, faire chou blanc;
– trouver des routes hallucinantes, dans des paysages somptueux vert fluo et jaune de toute la pluie tombée ces derniers temps;
– pester contre la DDE de l’Ardèche et de l’Aveyron, qui prennent bien le temps de mettre les panneaux « attention gravillons ». Faudrait juste qu’ils fassent l’effort de les mettre avant les gravillons, pas 100 m après…
– s’extasier devant une petite vallée remplie de pâquerettes;
– pencher à gauche, puis à droite, puis à gauche, puis à droite, et recommencer;
– oublier ce qu’est une ligne droite;
– monter et descendre des cols en veux-tu en voilà;
– avoir chaud et sentir que la saison des fennecs crevés au fond du blouson a commencé;
– me retrouver avec une vis de 5 cm de long dans le pneu arrière à 50 km de l’arrivée de vendredi soir, à 21h30, à 4 km du village le plus proche, mais, avec la chance d’être dans une zone où le portable capte;
– avoir des potes suffisament sympas pour abandonner l’apéro en cours pour venir m’apporter un kit anti-crevaison;
– les attendre pendant une heure et demi seule, en pleine cambrousse, au milieu des arbres, dans la nuit noire;
– avoir des potes suffisament sympas pour ne pas me taper dessus quand ils se rendent compte que la vis est simplement plantée dans la gomme du pneu et n’a pas percé la carcasse;
– suivre de nuit un Jumpy dans une route comme je les aime en plein jour, avec des épingles serrées, en se disant que je n’ai pas la même notion de « tranquillement » que le conducteur;
– faire la fête en rouge avec les copains, écouter la musique de Durango au bord de la piscine, se lever comme pendant la semaine parce que le soleil tape trop fort sur les tentes, rigoler, manger, boire un peu;
– apprendre qu’un copain s’est planté, avec pas mal de dégâts sur le bonhomme, avoir les boules, me demander comment je réagirais à sa place, arrêter de réfléchir, mettre le casque, les gants et le contact;
– se concocter avec délice un road-book de retour aux petits oignons;
– ne pas le respecter au bout de dix kilomètres;
– râler contre les stations-services de campagne, qui sont en panne le dimanche après-midi. Ou qui ne prennent pas la carte bleue et sont fermées (forcément, le dimanche après-midi…);
– discuter avec deux jeunes retraitées du plaisir de faire de la moto sur les Causses, tout en admirant le viaduc de Millau;
– redécouvrir les routes de l’Aveyron et se dire qu’elles sont top, passer du côté du Dourdou en passant aux copains qui font des rallyes, découvrir les gorges de la Truyère et savourer le fait qu’il y a encore plein de coins que je ne connais pas;
– raccourcir le trajet sur la fin parce que Murat – Condat – Besse – Issoire, c’est quand même moins raisonnable que Murat – Massiac – les gorges de l’Allagnon – Issoire à 21h un dimanche soir;
– arriver chez moi au soleil couchant et me dire, une fois de plus, que je n’habite pas dans cette région par hasard;
– éteindre le moteur de la SV, la ranger dans le garage, décrocher les sacoches cavalières et jeter les affaires en vrac dans la maison;
– être crevée mais heureuse;
– préparer la prochaine balade moto.
– me demander comment j’ai pu supporter de ne quasiment pas rouler pendant 3 ans…


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