10 – Maroc 2004 – Dure, dure, la piste

Publié le 15 janvier 2004

Mardi 13 janvier
Mahmid – Tagounite – piste vers Foum Zguid

Nous partons relativement tôt de Chez le Pacha et, à Mahmid, nous prenons la piste direction Foum Zguid. A Zagora, on nous a dit que cette piste est plus belle que celle qui part de Tagounite, qu’elle est facile, sans trop de sable. « Une autoroute à dromadaires ». Au bout d’un kilomètre, je vois Sam partir sur la droite, suivant un mec qui fait des grands signes. J’aperçois une moto, puis une silhouette en t-shirt bleu. J’attends quelques secondes puis je vais voir.


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Retrouvailles

Surprise, Marc et Edith sont là, en train de prendre le petit déjeuner alors que je les croyais au pire sur la piste, au mieux déjà à Tata. Ils ont tenté la traversée hier et, en cinq kilomètres de sable, Edith a cramé son embrayage. Ils ont fait rapatrier la moto à Mahmid chez un garagiste qui doit leur refaire un disque en contreplaqué (parait que ça se fait pour les 4×4). Avec Sam, on hésite un peu, puis on décide de rester avec eux et de tenter tous ensemble la piste plus au nord, par Tagounite, où il n’y a pas de sable.

La moto d’Edith revient, réparée, selon les dires du mécano, avec un disque en alu qu’il a été chercher à Zagora et avec l’ancien disque qu’il a intercalé. Bref, réparation douteuse. Nous repartons quand même, jusqu’à Tagounite. Arrêt essence et nettoyage des filtres à air. De vraies pochettes surprises, ces filtres, on y trouve même des glands. Et nous prenons la piste. Je ne vais pas très bien : toux toujours douloureuse, tête qui tourne, ce n’est pas la grande forme.


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Spectateur

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Pause

Le premier objectif est d’atteindre l’Oasis Sacrée. Enfin sacrée surtout pour les guides qui voulaient nous y emmener. Parce que les autochtones que nous rencontrons sur la piste, eux, ne savent pas de quoi on leur parle quand on leur demande si « l’Oasis sacrée » est encore loin. Lorsque la nuit tombe, nous sommes encore à une dizaine de kilomètres. Sam veut continuer, malgré l’obscurité. Pour une fois, Marc est d’accord avec moi : il vaut mieux faire le bivouac ici. En plein désert de cailloux, où il n’y a quasiment pas de végétation, Sam et Marc trouvent un vieil arbre mort qui sert à faire un beau feu. Le ciel étoilé est magnifique.


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Bivouac

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Désert

Mercredi 14 janvier
Piste vers Foum Zguid

Une dizaine de kilomètres après notre bivouac, nous arrivons à l’Oasis Sacrée. Fermée. Il ne doit pas y avoir assez de touristes en cette saison ! Après avoir crié, nous réussissons à attirer l’attention de quelqu’un à l’intérieur et on finit par nous ouvrir les portes. Nous prenons un pot dans ce qui est bien un attrape-touriste, avec hébergement sous tente nomade. Au-dehors, il n’y a pas grand chose si ce n’est quelques palmiers et une eau dans laquelle barbotent des tétards. Au loin se trouvent les dunes de Chagaga, mais vu notre rythme de progression, nous n’y allons pas. Et puis là-bas, il y a du sable, et dans le groupe, le sable ne fait pas l’unanimité. Trois motards passent. Des Allemands en 250, les bagages dans le 4×4 qui les suit.


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Arbre en bord d’oued

Nous reprenons la piste, au milieu des regs (déserts de cailloux) noirs. De chaque côté, des étendues noirâtres et devant, une trace légèrement plus claire faite de cailloux à peine tassés par le passage des 4×4. Ce n’est pas comme ça que j’imaginais une autoroute à dromadaires. Au premier village, nous faisons une pause au café « Le Repos ». Nous avons droit à un grand déballage de tapis et à la cérémonie du thé. Reposant et plein de gentillesse. Nous repartons, traversons un deuxième village puis nous arrivons au lac asséché d’Iriki. Un endroit complètement magique au milieu de ce désert. Il n’y a pas de cailloux, juste un terrain très plat. Nous traversons d’abord une vaste étendue noire, sans surprise, où on peut rouler tranquillement. Puis le noir devient rouge, nous roulons sur des petites fleurs. Et tout d’un coup, un océan de fleurs jaunes qui nous arrivent aux genoux. Ce n’est plus la peine d’essayer de suivre la piste, il n’y en a plus. Il n’y a que ces fleurs. Rouler dans ce champ est extraordinaire, cela donne l’impression de flotter. Malheureusement, cela ne dure pas longtemps car nous ne traversons qu’un petit bout de lac et nous reprenons la piste à travers les regs noirs que je commence à détester: cailloux sur les côtés, cailloux sur la piste, cailloux partout, cela semble ne vouloir jamais s’arrêter.

Au soleil couchant, nous arrivons à un poste militaire, dont il est dit dans le guide Gandini qu’il est le lieu d’un contrôle des papiers assez strict. En guise de contrôle, le militaire nous demande des cigarettes, tape la discussion, nous conseille de dormir ici et nous apporte, à la nuit noire, du thé et un pain et demi qu’il a fait lui-même ce matin.
L’endroit est calme, mais pas aussi bien achalandé que celui de la veille : Sam et Marc ne trouvent pas de vieil arbre mort et nous nous passons de feu de camp pour ce soir.

Jeudi 15 janvier
Piste – Foum Zguid – Tata

Plus que quarante kilomètres avant Foum Zguid. Je suis contente d’en avoir presque fini. Je vais mieux, ma bronchite a l’air de se calmer grâce aux antibiotiques fournis par Edith, que je prends depuis la veille. Petit déjeuner de pain et de lait lyophilisé. Le militaire revient nous voir avant notre départ et nous aide même à faire nos bagages. Le temps doit être long dans le coin et ça doit faire du bien d’avoir un peu de monde avec lequel parler. Nous repartons, mais je ne me souviens pas très bien de ce qu’il se passe. J’ai un vague souvenir d’une petite côte. Puis plus rien. Je me réveille par terre, la moto à côté, Sam me parlant. J’enlève le casque et vomis mon petit déjeuner. Ca ne va pas bien du tout. Marc est persuadé que je viens de faire une grosse chute et que je me suis fait peur. Je n’arrive pas à lui expliquer que je ne peux pas avoir eu peur, je me suis évanouie avant. Avec Edith, il repart. Sam l’appelle dès que son téléphone capte (le téléphone ne passe pas là où on est), pour lui dire s’il faut organiser les secours.

Au bout d’une heure et demi, qui me parait être une demi-heure, Sam me force à reprendre la moto. C’est dur, j’ai la bouche complètement asséchée au bout de trente secondes, je suis incapable de gérer la moindre difficulté. Je fais un kilomètre et je m’arrête. Au bout d’un quart d’heure, nous repartons. De kilomètre en kilomètre, nous avançons doucement.


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Seuls sur la piste

Sam essaye de m’encourager: « c’est super, on a fait deux kilomètres. Bois un peu, repose toi et on y va ». Il passe ma moto dans les endroits un peu délicats, comme les oueds ou les passages sablonneux. Même à pied, c’est dur et j’ai du mal à avancer. Au fil des heures, je vais quand même de mieux en mieux et les étapes sont un peu plus longues. Impossible de décrire la joie et le soulagement que nous avons à la simple vue du village de Foum Zguid au pied des montagnes. De plus, sur les derniers kilomètres, la piste devient de plus en plus facile. Le contact avec le bitume est un vrai bonheur ! Nous avons mis quatre heures pour faire moins de quarante kilomètres.

Nous retrouvons Marc et Edith à un café. Ils nous envoyé un 4×4 en secours mais celui-ci a visiblement tardé. Marc et Edith partent pour Tata, pendant que nous attendons le retour du 4×4. Partir serait sans doute une mauvaise idée, il n’y a qu’une route et il serait facile de nous rattraper. Le 4×4 arrive. Il a fait une boucle et a rejoint l’endroit où nous étions par un autre bout de piste, ce qui explique qu’on ne l’a pas croisé. Il nous réclame la somme convenue avec Marc (900 DH), mais nous ne voulons le payer que pour son déplacement, vu que nous nous sommes débrouillés sans lui. Fatigués et pressés d’en finir, nous ne négocions qu’à 400 DH et nous partons pour Tata. De nouveau, il y a discussions et éclaircissements avec Marc. L’équipe se sépare de nouveau. Alors que je suis épuisée et n’ai qu’une envie, dormir, nous passons la soirée tous ensemble sur internet pour faire le CR de la piste pour le site.


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